28 Mar 2023
La troisième histoire

Les principes de la Gestalt laissent au thérapeute une grande latitude dans son approche de chaque patient et de chaque relation thérapeutique. Que ce soit à travers la méditation, la danse, ou encore l’écriture, j’adapte mon accompagnement de manière créative et en fonction de mes ressentis. Cela peut parfois déconcerter certains patients habitués à des méthodologies plus rationnelles, mais ces expériences ont toujours des effets notables.

Une relation entre un patient et son thérapeute est d’abord une histoire de rencontre. Je m’attache à accueillir chacun d’entre eux comme il est, ici et maintenant, sans pour autant laisser de côté qui je suis et ce qui m’anime.

Ma formation de thérapeute tout comme mon expérience me confèrent une forme de savoir, d’autorité intellectuelle, mais je m’efforce toujours de prendre du recul et de privilégier la spontanéité par rapport à mes ressentis, sans chercher forcément à tout définir. Les patients n’ont pas obligatoirement besoin que j’identifie les émotions qui les traversent ou que je nomme leurs souffrances : l’important est qu’ils en prennent conscience et que, ensemble, nous trouvions comment les dépasser. 

Le rôle central de la "Troisième histoire"

La "Troisième histoire", c’est celle qui se co-créée entre le patient et le thérapeute, au-delà de leurs histoires respectives. Cette relation patient-thérapeute est une entité à part entière, distincte des deux histoires singulières mais tout aussi importante.

"Le trait d’union entre les deux signifie qu’ils sont en lien et que leurs éléments sont toujours en interdépendance et dans un système de co-influence. Organisme et environnement sont indissociables. Ils forment un tout qui est beaucoup plus que "la somme des parties."
Jean-Marie Delacroix, La pleine conscience en psychothérapie, 2020.

L’exemple de l’écriture thérapeutique

Pour la première fois sur ce site, j’ai décidé de détailler un cas clinique que je trouve particulièrement intéressant, l’histoire de ma relation thérapeutique avec "J". Dans cet exemple, j’ai choisi le médium de l’écriture pour aller plus loin dans l’exploration de son histoire, de ses souffrances et de ce que notre relation peut lui apporter. Proposée de manière spontanée et sans but précis en tête, cette approche a été très porteuse.

Le thérapeute gestaltiste se donne à lui-même "le permis d’être créatif" et peut le faire aussi en proposant l’écriture en cours de séance thérapeutique. Écrire en thérapie signifie potentialiser et perpétuer la tendance narrative personnelle du patient en lui offrant la possibilité de synthétiser de façon complète et engagée son vécu personnel, d’organiser en un tout chargé de sens les faits et émotions qui ont caractérisé son existence et d’avoir une vision plus ample et profonde de soi comme protagoniste et dans le même temps narrateur d’une histoire qui "mérite un roman". [...] 

Écrire en thérapie signifie écrire au et pour le thérapeute. Cet aspect relationnel est d’importance fondamentale pour accueillir le sens d’une activité qui se veut multi-fonctionnelle… 

C’est dans le processus de raconter-à-toi-qui-lis, plus que dans l’explication des contenus cachés, que se concrétise la valeur thérapeutique de la narration écrite. Le prérequis fondamental est que le patient ait une familiarité ou pour le moins une curiosité envers l’écriture comme moyen d’expression. Cette motivation de base est suffisante pour pouvoir construire une ou une série d’expérimentations thérapeutiques qui, selon le principe déjà développé de la cocréation, sont improvisées sans schémas prédéfinis. Ce sera l’intuition du thérapeute dans l’ici et maintenant de la relation qui déterminera le choix ou même l’invention de l’exercice "juste"."

Giuseppe Sampognaro, Écrire en thérapie (traduit de l'italien Scrivere in terapia), dans Gestalt 2011/1 (n° 39), pages 125 à 139.

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